samedi 9 août 2014

L'art de dénigrer la médecine

Article rédigé en collaboration avec Zoélie Fresh.



Les thérapies charlatanesques ont toujours existé. Mais de nos jours, on remarque un large développement du nombre et de la diversité de ces pseudo-thérapies souvent simplement dites « alternatives » à la médecine, alors que si nous, charlatans, étions un peu plus honnêtes, nous nous contenterions de les dire « éventuellement complémentaires » à la médecine… Ce qui ne serait pas bon pour le business.


En cause les dérives (car oui, il y en a partout) de l'industrie pharmaceutique, qui font finalement du tort à cette médecine en mesure de nous sauver la vie, alors que la charlatanerie ne laisse pas la moindre chance de survie. Et c’est sur ces dérives que nous, charlatans, devons amplement « surfer », en les exagérant, en les élargissant à tout le domaine médical et à toute la recherche, même s’il s’agit d’actes isolés, et en aggravant un petit peu l’histoire si nécessaire.


La preuve dans cette vidéo "pro-santé nature innovation", le site qui dénigre lourdement la médecine en prétendant bien évidemment guérir par des thérapies alternatives toutes plus saugrenues les unes que les autres (vendues comme naturelles et guérissant miraculeusement de toute maladie). 

Chers lecteurs de la revue dont il est fait grandement propagande nommée "Alternative Bien-être", cette vidéo prétend qui plus est vous protéger contre ce qu'ils nomment l'obscurantisme médical (autrement dit, le fameux complot de Big Pharma, argument phare des charlatans) et protéger également les lecteur contre les charlatans! Quelle ironie, n'est-ce pas ?


Le site Sante Nature Innovation nous montre comment doivent raisonner les bons charlatans. Mais pour lire des informations plus honnêtes sur ce site charlatanesque, rendez-vous sur cet article de Psiram.


Le traitement chimiothérapique qui ferait croître les tumeurs


Les traitements de chimiothérapie sont en constant développement. Deux d’entre eux (5-fluorouracile et la gemcitabine) ont été pointés du doigt (notamment sur cette page de « sante natureinnovation »), car il s’est avéré après une étude plus approfondie par des chercheurs, que leur efficacité était en partie inhibée car elle modulerait la réponse immunitaire anti-tumorale. L’expérience sur des souris aurait montré une augmentation des tumeurs !

C’est là que vous devez vous arrêter, en tant que futurs charlatans, pour convaincre des méfaits des traitements chimiothérapiques. Contentez-vous de dire que la solution pour la médecine, c’est de donner un second médicament « contre » les effets indésirables du premier, dans le but de voir florir l’industrie pharmaceutique. Et cela paraît évidemment absurde à qui s’en tiendra à cette version écourtée du sujet.

C’est bien entendu une façon biaisée et charlatanesque d’interpréter la réalité.

La vérité, qu’il faut garder pour nous, arrive ensuite… Une fois que l’on trouve le moyen d’empêcher l’activation du complexe protéique responsable de la « perversion » du système immunitaire sur les cellules cancéreuses, le traitement s’avère être d’une grande efficacité prouvée. En gros, la médecine avance pas à pas, et si en un seul médicament, il est encore difficile de combiner les deux actions, alors deux médicaments restent d’une efficacité démontrée pour traiter une tumeur. Mais chut !

Une équipe de l’INSERM a même travaillé dessus afin de trouver comment désactiver cette modulation du système immunitaire lié au traitement, et ses résultats sont plus que probants.

Inutile cependant d’en dire plus aux cancéreux que vous souhaitez arnaq… heu « soigner » avec des thérapies alternatives charlatanesques, car tout dépend, une fois encore, de la façon d’interpréter ce que l’on lit.

Cachez également le fait que ces chercheurs nous offrent avec transparence le cheminement qui les a fait avancer dans la recherche contre le cancer, et servez-vous uniquement des informations qui vous plaisent, en laissant de côté l’interprétation réelle du sujet.

Pour les plus soucieux du danger (pécuniaire pour nous) que représentent ces traitements réellement efficaces contre le cancer qui peuvent nuire à notre activité charlatanesque et pour plus de détails scientifiques sur le développement de ces traitements et de leur évolution, rendez-vous sur le site de l’INSERM.

Les maladies qui n’existent pas dans le monde des charlatans


Un autre moyen que nous, charlatans, utilisons pour dénigrer la médecine est de crier haut et fort que nul ne cherche à trouver la pilule miracle qui soigne tout et qu’au contraire, on donne des médicaments en prévention (quel drôle de mot à définir à notre manière, vous le verrez ensuite!) pour éviter en réalité et en toute honnêteté que la maladie, pour laquelle on n’a pas encore de traitement, ne se déclare. Encore Big Pharma qui veut faire des bénéfices, devez-vous arguer insidieusement !

La médecine parle de prévention (et à juste titre bien souvent, reconnaissons-le discrètement), car une fois la maladie déclarée, il arrive qu’il soit trop tard, surtout si aucun traitement n’a encore été découvert… De là vient l’intérêt effectivement de la prévention.

Mais face à cela, les charlatans doivent parler péjorativement de médicaments « au cas où », que l’on prend toute notre vie afin d’alimenter l’industrie pharmaceutique, contre « un processus clinique dont on ne connaît pas l’échéance ». Bien dit n’est-ce pas ? Cela nous laisse le champ libre pour proposer des produits miracles hors de prix et sans effet afin « d’aider » les gens souffrant d’une maladie pour laquelle ils n’ont pas suivi les conseils préventifs de la médecine conventionnelle.

Les exemples anti-médecine vont bon train, servez-vous:


- La maladie d’Alzheimer, pour laquelle il existe des traitements qui ont pour but de « ralentir et stabiliser temporairement le processus dégénératif en plus d'améliorer de façon temporaire l'état de la personne affectée ». Bien évidemment, nous devons les présenter comme très onéreux, donc bénéfiques à l’industrie pharmaceutique et bien sûr inutiles, allant jusqu’à dénoncer un unique effet soi-disant placebo, bien que les neurologues défendent une efficacité prouvée pour maîtriser les symptômes, ralentir leur progression, empêcher l’aggravation de la maladie et améliorer temporairement (le temps du traitement) l’état de la personne atteinte. Mais qu’importe ! Misons sur le fait que si nous sommes convaincants, nos « patients » n’iront pas chercher plus d’informations ailleurs.

- Les dépistages (cancer de la prostate, cancer du sein etc), sont hautement critiqués par nous, les charlatans ! Nous nous devons de ne voir là qu’un abus massif du système de dépistage radiologique qui coûte trop cher à la sécurité sociale. Nous allons jusqu’à leur imputer une dangerosité liée à l’exposition aux outils de dépistage, qui est à nuancer fortement. C’est un point de vue qui n’est bien entendu pas partagé par le corps médical, ni par toutes les personnes dont les cancers ont été dépistés et traités à temps. Mais encore une fois… Chut !

- La vaccination (HPV contre le papillomavirus etc) est, elle, accusée par nous, charlatans assermentés, de tuer, de provoquer moult effets secondaires, certains irréversibles, en cause les fameux « adjuvants » et bien sûr d’être totalement inefficace. Ce que nous devons, bien entendu, omettre, c’est que si la vaccination existe c’est pour protéger contre des maladies mortelles (qui peuvent donc tuer) une fois les premiers symptômes déclarés.

Les normes d’alerte qui seraient changées selon le gré du vent


L’un des arguments les plus en vogue dans notre métier charlatanesque est de prétendre que les normes d’alerte que nous qualifions initialement de discutables bien sûr, seraient qui plus est, élevées ou baissées en fonction du nombre de malades.

Arrive alors en tête des accusés, dans notre discours anti-médecine, les traitements pour faire baisser le cholestérol, sous prétexte que « il y a 100 ans, on ne savait même pas que ça existait, et on ne s’en portait pas plus mal ! » Phrase à la mode et très efficace que vous devez absolument retenir et à laquelle nos « patients » ne trouvent pas toujours de réponse… Et pour cause ! Car, nous répondrait un médecin : 

« Oui, mais il y a 100 ans, on n’avait pas encore pris conscience de l’ampleur des maladies cardiovasculaires, de la responsabilité du cholestérol dans l’affaire et on ne calculait pas le nombre de décès liés aux maladies cardiovasculaires ! En bref, la médecine avance et tente de limiter les dégâts des maladies cardiovasculaires (liées bien sûr à l’évolution de notre mode de vie plus sédentaire et à notre alimentation plus riche aujourd’hui), en contrôlant le taux de cholestérol dans le sang. Pour finir, il n’y a rien d’inventé ou de « pompeux » dans la nomination du bon et du mauvais cholestérol, comme veulent nous le faire croire les charlatans… C’est juste une qualification scientifique et prouvée en somme. Bla bla bla… ». 

Ah ! Ces médecins qui veulent briser notre commerce et notre propagande anti-médecine !

Conclusion


En conclusion, l’industrie pharmaceutique connaît elle aussi ses dérives (et elles sont souvent particulièrement médiatisées par nous, charlatans bienveillants, qui en profitons pour y englober la médecine, la recherche etc et dénigrer tout cela en déformant la réalité, comme ce fut le cas pour l’affaire Avandia, ou en détournant le discours des médecins, misant sur le fait que les gens n’iront pas vérifier l’information à la source).

Il faut insister lourdement sur cette propagande afin de lutter contre le discours de la médecine conventionnelle qui veut sauver la vie de nos « clients » en répondant ceci à nos accusations mensongères : 

« Ce n’est pas parce que l’industrie pharmaceutique est victime des dérives, qu’il faut remettre sa vie entre les mains d’un charlatan. La médecine sauve nombre de vies chaque jour alors que les charlatans tuent impunément. Se tourner vers les thérapies alternatives dont l’efficacité n’est pas prouvée au détriment de la médecine est DANGEUREUX. » Bla bla bla…



Un discours bien rodé qu’il nous faut tuer à coup de propagande anti-médecine ! Charlatans, au travail !


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